Pourquoi le Yémen connaît-il aujourd’hui la pire épidémie de choléra au monde ?


Dans le pays en guerre, le choléra a atteint presque l’ensemble des gouvernorats. La pire épidémie de choléra au monde est en train de se propager. Dans des conditions sanitaires et sécuritaires difficiles et un système de santé affaibli, le Yémen est un terrain fertile à la propagation de la maladie.

Depuis avril 2017, les malades affluent dans le centre de traitement du choléra de l’hôpital d’Al-Jabeen à Raymah. Certains patients sont incapables de se déplacer. Ils ont été portés par leurs proches jusqu’au centre et restent allongés quelques jours le temps de recevoir le traitement nécessaire. « Début juin, nous sommes passés de 9 à 11 lits et les besoins sont bien supérieurs à ces chiffres. Certains patients doivent partager un même lit pour recevoir leur traitement. L’hôpital ne peut malheureusement pas accueillir davantage de lits, sa capacité étant limitée, sachant que le centre de traitement du choléra est situé dans une aile séparée du bâtiment pour éviter tout risque de contamination avec les autres malades », explique Ondine, coordinateur des programmes au Yémen à Première Urgence Internationale.

Le pays, en guerre depuis plus de deux ans, vit actuellement la pire propagation de choléra au monde, avec un nombre de cas suspectés d’une moyenne de 5 000 par jour. En deux mois seulement, l’épidémie a touché 21 gouvernorats sur les 22 du pays.

Depuis le 27 avril 2017, date du début de la seconde vague de choléra dans le pays (la première avait duré d’octobre 2016 à mars 2017), le choléra a fait 1 614 morts  sur les plus de 269 600 cas suspectés et/ou confirmés, selon le bulletin épidémiologique de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) publié le 4 juillet 2017. La pire épidémie de choléra au monde est en train de se propager.

Pourquoi le choléra se propage-t-il de façon exponentielle au Yémen ?

La quasi-totalité du pays est actuellement touchée par l’épidémie. Plusieurs facteurs sont en cause de cette rapide propagation : un conflit qui dévaste le pays depuis plus de deux ans, un accès difficile à la population ayant besoin d’une aide, l’insécurité et l’état des infrastructures routières dans les zones reculées du pays, le non-paiement des fonctionnaires de santé par l’Etat depuis presque une année, la non-fonctionnalité de près de la moitié des centres de santé dans le pays, l’effondrement des services de provision d’eau et l’insalubrité qui règne dans les villes et villages. Les ordures ne sont plus ramassées régulièrement dans la capitale Sana’a depuis des mois. Près de 14,5 millions de personnes sont privées d’accès à l’eau potable, ce qui a entraîné la propagation de la maladie à un taux effrayant. A ces difficultés s’ajoutent les problèmes d’approvisionnement de médicaments et de matériel médical dans le pays.

« Les populations sont peu informées des raisons de la propagation de cette maladie et des mesures à mettre en place pour la contenir. En raison du conflit et de la grave crise alimentaire qui sévit actuellement, les Yéménites sont affaiblis et sont dans une situation plus vulnérable. Les femmes, les enfants et les personnes âgées notamment sont plus fragiles et donc plus à risque de décéder de déshydratation, principal effet du choléra », explique Ondine.

« Nous sommes les seuls à intervenir dans le Gouvernorat de Raymah »

Première Urgence Internationale appuie un centre de traitement du choléra depuis le 24 mai 2017 dans le Gouvernorat de Raymah où il existe peu d’acteurs de santé.  « Nous soutenons le fonctionnement de la structure à travers le versement de primes compensatoires pour le personnel de santé , l’acheminement de matériel médical et de médicaments, la nourriture pour les patients et leurs proches ainsi que le transport des patients les plus sévèrement atteints par la maladie vers un hôpital pour une prise en charge en cas de complications médicales, comme une déficience rénale par exemple », précise Camille Delorme, chef de mission au Yémen à Première Urgence Internationale.

L’ONG est également en cours d’ouverture de neuf points de réhydratation orale dans cette même région, dont un dans le même périmètre que l’hôpital d’Al Jabeen, afin de désengorger le centre de traitement. Un point de réhydratation orale permet de prendre en charge les cas moins sévères grâce à l’administration de sels de réhydratation orale avec de l’eau potable.

« Nous sommes les seuls à intervenir dans le gouvernorat de Raymah et nous sommes parvenus à mettre en place une réponse rapide. Nous sommes également en train de proposer une réponse complémentaire à celles déjà existantes à Sanaa. Mais globalement, les autorités et les humanitaires font face à de grosses difficultés de financement alors que les besoins sont considérables », conclut Camille Delorme.

*Les activités sont financées avec le soutien du programme d’aide humanitaire européen (ECHO) et du Centre de Crise et de Soutien (CDCS)

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