NIGERIA « A peine 25% des besoins sont couverts par l’aide humanitaire»
Elsa Softic est chargée des Urgences à Première Urgence Internationale. Elle a participé à la mission exploratoire au Nigeria en décembre et janvier dernier et elle est actuellement dans le pays pour l’ouverture de la mission. Pour elle, la présence de l’ONG est indispensable vue l’ampleur des besoins humanitaires.
Quel est le contexte au Nigeria ?
Le Nigeria est le pays le plus peuplé d’Afrique avec près de 200 millions d’habitants. C’est aussi la première économie du continent. Bien que disposant de très nombreuses ressources naturelles, le pays compte encore de grandes disparités, notamment entre le sud plus riche et plus développé, et le nord déjà affaibli par un climat sahélien et la récession du lac Tchad, laissé de côté par les politiques publiques des gouvernements successifs.
Ce sous-développement a créé un terreau fertile pour le groupe terroriste dit « Boko Haram » qui est parvenu à prendre de l’ampleur. Constitué en 2002 à Maiduguri dans l’état de Borno au nord-est du pays, le groupe, qui s’est construit autour de la contestation populaire face au délaissement de l’Etat et aux accusations de corruption des dirigeants locaux, multiplie les attentats contre les symboles de l’Etat. En 2011, le groupe se radicalise, et commence à attaquer les populations civiles de l’Etat de Borno. Ces attaques provoquent des vagues de déplacements successives jusqu’à un pic en 2014 et 2015. Aujourd’hui, on estime à 3 millions le nombre de déplacés internes ayant fui leurs villages.
Quelle est la réponse humanitaire de Première Urgence Internationale ?
Tout d’abord, nous avons mené une mission exploratoire entre décembre et février derniers pour comprendre la situation humanitaire et rencontrer l’ensemble des partenaires déjà présents sur place. Ce que nous avons vu sur place dépassait de loin ce que nous pouvions attendre. La ville de Maiduguri, qui compte d’ordinaire 2 millions d’habitants, a accueilli plus de 1,7 millions de déplacés. Sa population a quasiment doublé en un an, ce qui exerce une pression sur les ressources, notamment alimentaires.
En effet, le besoin premier des populations, qu’elles soient déplacées ou hôtes, est l’accès à la nourriture. Nous avons également constaté des problèmes d’accès à l’eau et à l’assainissement.
Première Urgence Internationale a choisi d’intervenir auprès de la population vulnérable du quartier de Flour Mills de Maiduguri à travers un premier programme d’aide alimentaire destiné à 1 000 ménages pendant une durée de 6 mois.
Malgré la présence grandissante des acteurs sur place, on estime qu’à peine 25% des besoins sont couverts par l’aide humanitaire.
Aujourd’hui, pour des raisons de sécurité, les acteurs humanitaires accèdent très difficilement aux zones en dehors de la ville de Maiduguri. Les zones rurales de l’Etat de Borno comptent autant de personnes que la Centrafrique !