« Un jour, les villageois ont fait tomber un mur sur moi »


Des migrants dans l’ancienne patinoire de Cergy

Ancienne patinoire de Cergy en Ile-de-France, le mercredi 10 mai. Des dizaines de migrants attendent de rencontrer un médecin grâce à l’action menée par Première Urgence Internationale. Un Afghan s’éloigne du groupe et tient à raconter son histoire. Voici son récit bouleversant.

Deux lits de camps recouverts de devets sur la patinoire de Cergy

«  Je m’appelle Arman*, j’ai trente-trois ans et je suis homosexuel. C’est interdit dans mon pays, l’Afghanistan. Je suis d’origine Pachtoune. Avant, je travaillais dans le bâtiment, je construisais des maisons. J’allais souvent en Iran pour trouver du travail.

J’ai été marié de force à l’âge de 13 ans. Je viens de la province de Logar, au sud de Kaboul. Avec ma femme et nos cinq enfants, nous vivions dans un petit village isolé du district de Charkh. C’est un village tellement isolé que les Américains n’y sont jamais allés. La région est contrôlée depuis des années par les Taliban. On devait suivre des règles très strictes, la vie était très dure. Dans mon pays, être homosexuel est passible de la peine de mort. Tout le monde me regardait d’un très mauvais œil. J’ai été persécuté pendant des années, même par ma propre famille. Un jour, les villageois ont fait tomber un mur sur moi. J’avais dix-sept ans, j’ai cru que j’allais mourir. Je suis resté longtemps sous les gravats. Mes proches ont réussi à me sauver mais j’ai encore de nombreuses blessures. »

Arman montre ses cicatrices au dos, aux bras et à la tête.

« Mes enfants ont commencé à être persécutés, eux aussi. C’était devenu impossible de rester.

Il y a un an et demi, je suis parti avec ma femme, mes enfants et ma belle-famille. Nous voulions aller en France. J’aime tellement ce pays que j’ai nommé l’un de mes quatre fils « Paris ».  À la frontière iranienne, nous avons été séparés. Je suis monté dans un camion, mes proches dans un autre. Les choses ne se sont pas du tout déroulées comme prévu : le passeur a pris la fuite, j’ai dû conduire le véhicule moi-même. J’avais très peur, mais je savais qu’il n’y avait pas d’autre solution. Je ne pouvais pas retourner en Afghanistan.

J’ai continué le chemin avec mon neveu. On a traversé la Turquie, la Grèce, l’Autriche et enfin la France. Nous sommes arrivés dans la capitale il y a trois jours à Porte de la Chapelle. Je n’ose pas dire à mon neveu que je suis homosexuel, tout comme aux autres Afghans que j’ai rencontrés. J’ai peur qu’on me tabasse de nouveau ou qu’on me tue.

C’est la première fois que je raconte mon histoire », confie-t-il, les larmes aux yeux. «  Je n’en avais encore jamais parlé. C’est horrible comme situation. Je suis un être humain, j’ai le droit de vivre comme je veux ».

Arman recherche ses proches dont il est sans nouvelle. Il souhaiterait s’installer en France et trouver du travail. Il confie son immense détresse : « Si je n’obtiens pas mes papiers, je m’immolerai ».

Arman a été mis en contact avec une association de protection de réfugiés homosexuels qui ont dû fuir leur pays où ils étaient persécutés. Il a ensuite longuement discuté avec la psychologue de Première Urgence Internationale.

* le prénom a été modifié

Comment sont utilisés vos dons ?

Stats Chaque année, Première Urgence Internationale affecte l’essentiel de ses ressources aux programmes qu’elle déploie sur ses différents terrains d’intervention et seulement 0,2% à la recherche de fonds. Vos dons sont essentiels.

Reprendre en main son destin !

Vos dons sont les garants de notre liberté d’action. Ils nous permettent de venir en aide aux populations affectées par des crises oubliées qui ne retiennent l’attention ni des médias, ni des bailleurs de fonds institutionnels. Les sommes collectées constituent ainsi les fonds propres de l’association, lui donnant une autonomie d’action et une réactivité accrue.
Faire un don