Irak : assurer la sécurité des familles face au COVID-19 dans les camps
En Irak et au Kurdistan irakien, Première Urgence Internationale est un acteur important de santé dans les camps. L’ONG gère les centres de santé primaires de trois camps qui accueillent des réfugiés et déplacés internes. Pour continuer à répondre aux besoins de ces populations vulnérables pendant la pandémie, la mission a réorganisé ses actions, et notamment mis en place des zones de quarantaine et des sessions d’information et sensibilisation.
Une session d’information sur le COVID-19 dans le camp de Bardarash, gouvernorat de Dohuk. © Première Urgence Internationale – Mars 2020.
Première Urgence Internationale gère trois centres de santé primaire dans des camps en Irak et au Kurdistan irakien : un dans le camp de Salamiyah, un dans le camp de Bajet Kandala (tous deux accueillant des déplacés internes), et le dernier dans le camp de Bardarash (qui accueille des réfugiés syriens). Dans tous ces camps, les besoins humanitaires sont énormes. Les déplacés internes et familles de réfugiés sont parmi les personnes les plus vulnérables en Irak, en besoin urgent d’assistance humanitaire.
Éviter la propagation du virus dans les camps
Avant la pandémie de COVID-19, Première Urgence Internationale intervenait déjà dans ces camps, Assurant la gestion des centres de santé primaire et fournissant aux résidents un soutien en santé, protection, accès à l’eau et services d’assainissement.
Avec l’arrivée du virus dans le pays en février 2020, Première Urgence Internationale a dû réorganiser et adapter ses activités, afin de continuer à répondre aux besoins les plus urgents des populations, tout en réduisant les risques de propagation du virus :
- Réorganiser les zones d’accueil et d’attente dans les structures de santé, pour maintenir la distance de sécurité entre les patients. Les bénéficiaires attendent désormais dehors, à l’entrée des centres, dans une zone ouverte, assis sur des fauteuils installés à distance suffisante les uns des autres. Ils sont ensuite reçus à l’intérieur dans la salle d’attente, par petits groupes, pour assurer la distance de sécurité à chaque étape. Les patients souffrant d’infections respiratoires sont reçus en priorité.
- Des relais communautaires animent des sessions d’information et sensibilisation sur le COVID-19 aux résidents du camp, de manière quotidienne, soit au porte-à-porte soit dans les salles d’attente extérieures des centres de santé. Première Urgence Internationale a également réalisé et accroché des affiches d’information à l’entrée et sur les murs des centres.
- Toutes nos équipes ont été formées à la détection des cas de COVID-19, ainsi qu’aux procédures de référencement et suivi. Des procédures strictes de nettoyage et désinfection sont suivies pour tous les équipements et surfaces des centres de santé. Dans les camps, les équipes de Première Urgence Internationale portent des masques de protection et s’assurent de prendre toutes les mesures de précaution nécessaires, pour éviter tout risque de contamination et propagation du virus.
- Dans les trois camps, des zones d’isolement (salles ou tentes) ont été mises en place à l’extérieur des centres de santé, avec un accès séparé. Elles sont utilisées pour l’isolation préventive temporaire de tout cas suspect, jusqu’à ce qu’il soit référé, si besoin, à un hôpital compétent, pris en charge par les équipes et ambulances gouvernementales. Ces zones d’isolement sont équipées avec du matériel de protection individuel (masques, gants…), du matériel médical, et des stocks d’oxygène.
Une tente d’isolement dans le camp de Salamiyah, gouvernorat de Ninive. © Première Urgence Internationale – Mars 2020.
Atténuer les impacts négatifs du COVID-19 sur la santé mentale
La pandémie de COVID-19 provoque énormément d’anxiété et de stress, particulièrement chez les personnes à risque et vulnérables. Cela inclut les enfants (dont les routines quotidiennes sont totalement bouleversées), les patients suspects en quarantaine, les professionnels de la santé, ainsi que les personnes avec des troubles mentaux préexistants (dépression, angoisses, troubles psychotiques). Certaines de ces pathologies, si elles ne sont pas prises en charge, sont graves et potentiellement mortelles et la plupart de ces troubles influencent la capacité des patients à suivre les mesures de sécurité nécessaires et à maintenir une bonne santé physique.
Les services essentiels de santé mentale doivent donc être maintenus, voire renforcés, durant cette période de crise sanitaire et pandémie. Mais les mesures de prévention en place, affectant par exemple la liberté de mouvement, empêchent certaines populations d’accéder à ces services. « Les restrictions de mouvement affectent aussi négativement la santé mentale des gens, en particulier les résidents de camps, où les familles entières doivent rester enfermées toute la journée dans une petite tente », souligne Tiina Hokkanen, Coordinatrice en santé mentale et soutien psychosocial sur la mission Irak. « La promiscuité des familles réduit aussi les possibilités d’utiliser le temps libre de manière constructive (jeux, exercice physique, travaux manuels) et augmente, en revanche, les risques d’opter pour des stratégies d’adaptation non-constructives : hypersomnie, consommation d’alcool ou de tabac… Ces conditions de confinement augmentent aussi les risques de violences familiales, dont la maltraitance des enfants. »
Les restrictions de mouvement et la réduction des horaires d’ouverture des centres de santé augmentent également le risque que certains patients épuisent leur stock de médicaments et soient dans l’incapacité de se réapprovisionner, ce qui augmente le risque de rechute et de comportements dangereux (violence, automutilation, voire tendances suicidaires). L’incertitude, la détresse et la possible stigmatisation liées à la pandémie, ainsi que les mesures strictes inédites prises pour y faire face, peuvent provoquer de graves troubles mentaux dans une population déjà à risque et vulnérable, et peuvent également augmenter les pathologies préexistantes.
Face aux contraintes induites par le COVID-19, Première Urgence Internationale a rapidement adapté ses activités, intégrant notamment l’usage du suivi individuel à distance (téléphone) pour certains bénéficiaires. Les patients aigus sont contactés par téléphone par des psychologues et professionnels psychosociaux : l’équipe de santé mentale de Première Urgence Internationale a développé une liste des bénéficiaires à haut risque, nécessitant un suivi à distance. Dans la première phase de la réponse, cela incluait les patients à tendances suicidaires, lourdement dépressifs, avec troubles psychotiques, avec addiction à l’alcool ou la drogue, ou avec un fort niveau d’angoisses. Dans la seconde phase, tous les patients de moins de 18 ans ont été contactés individuellement.
Les équipes de Première Urgence Internationale ont également collecté de l’information sur ce service de suivi à distance, afin d’améliorer sa qualité. Garantir la confidentialité et le secret de ces consultations est essentiel, au même titre que la protection des enfants maltraités et la prévention des violences basées sur le genre. L’équipe est formée en continu sur le conseil à distance et la gestion de cas critiques.
Assurer la continuité des activités
En parallèle de ces activités dans les camps, Première Urgence Internationale continue également d’intervenir dans d’autres régions d’Irak, comme le gouvernorat de l’Anbar. En avril, Première Urgence Internationale a distribué des kits d’hygiène aux foyers vulnérables vivant dans des zones endommagées ou détruites par la guerre dans le sous-district de Al-Rummanah, district de Qaim.
Pour le moment, la mission concentre sa réponse au COVID-19 dans les structures de santé des camps : prévention, sensibilisation, détection précoce, et référencement des cas. Les autres activités ont été mises en pause dans le reste du pays et reprendront dès que les restrictions de mouvement seront levées, avec des procédures préventives de protection et désinfection. Les activités en groupes resteront à l’arrêt pendant quelques mois, jusqu’à ce que les équipes de Première Urgence Internationale soient sûres que la transmission du virus n’est plus en cours en Irak et au Kurdistan irakien.
Ces activités sont mises en place grâce au soutien des États-Unis et du peuple américain (USAID-OFDA) et du Gouvernement français à travers le Centre de Crise et de Soutien. Ces programmes et l’accès à certaines zones sont également facilités par OCHA.