Pour Valentin, « c’est du jamais vu » au Tchad


Valentin Badiel est coordinateur terrain à Abéché à l’est du Tchad pour Première Urgence Internationale. Il nous parle de la situation dans cette zone et dans un pays qui subit une crise alimentaire récurrente.

est du Tchad

« Je ne veux pas être pessimiste », débute timidement Valentin, « mais la situation empire au Tchad », poursuit-il avec inquiétude. Valentin Badiel travaille pour Première Urgence Internationale depuis avril 2018 dans la région du Ouaddaï, à l’est du Tchad. Dans cette zone rurale, les populations vivent de l’agriculture. « J’étais au Tchad en 2015. Trois ans plus tard, je suis revenu. Je constate que  la situation est toujours aussi fragile. La crise nutritionnelle est récurrente et la population est menacée par la famine ».

Dans le Ouaddaï à l’est du Tchad, les sols sont devenus non productifs

En 2017, le nombre de cas de malnutrition pour tout le pays est estimé pour mai 2018 à plus de 1,5 million (1 736 237), en comptant les populations réfugiées. Finalement, en mai 2018, le nombre de cas a atteint 2 millions (2 072 966). Ce qui représente un dépassement de plus de 100% des projections (selon le Cluster nutrition). « Ce qui signifie une dégradation alarmante de la situation », explique Valentin, « et pas seulement en zone rurale. Même à  N’Djaména, la capitale du pays, les habitants ont du mal à joindre les deux bouts ».

Valentin explique cette situation par la crise économique persistante conjuguée à des sécheresses consécutives. La diminution de la production agricole dans la région du Sahel a entraîné une augmentation du nombre de personnes qui migrent des zones rurales vers les zones urbaines. Elles y vivent dans des conditions précaires. De plus, la crise économique, la pauvreté et le chômage affectent la capacité des gens à acheter de la nourriture «  Dans le Ouaddaï, les sols sont devenus non productifs. Les paysans ne parviennent à subvenir aux besoins de leur famille ».

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L’hôpital d’Abéché débordé suite à une épidémie de rougeole

Depuis juillet dernier, une épidémie de rougeole sévit à Abéché augmentant les risques de malnutrition infantile. « L’une des premières complications de cette maladie est la malnutrition. En effet, l’enfant qui souffre de rougeole ne parvient plus à s’alimenter ».

L’unité pédiatrique de l’hôpital régional d’Abéché où interviennent les équipes de Première Urgence Internationale, a alors fait face à un afflux de patients important. « Cette situation a coïncidé avec une grève des agents de santé dans le pays. A Abéché, cette grève paralyse les centres de santé urbains. Cela oblige les malades quelle que soit la gravité de leur pathologie, à aller directement à l’hôpital régional ».

Avec l’épidémie de rougeole, le service de pédiatrie de l’Hôpital régional a été débordé cet été par l’afflux de malades, se souvient Valentin. Les stocks de médicaments approvisionnés par Première Urgence Internationale ont été rapidement épuisés. « Nous avons été obligés de trouver une solution d’urgence pour compléter notre stock devenu insuffisant ».

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Les équipes en soutien aux enfants et aux femmes atteints de malnutrition

Dans la région du Ouaddaï à l’est du Tchad, les équipes de Première Urgence Internationale apportent un appui à 22 centres de santé. L’objectif : assurer une prise en charge de la malnutrition chez les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes et allaitantes. Cette année, les équipes parlent de la situation comme d’« un gouffre » soupire Valentin.

Une approche intégrée pour agir à long-terme

Pour Valentin, il faut continuer à agir dans l’urgence. Il faut également développer en parallèle des programmes pour lutter contre l’insécurité alimentaire à long terme. « C’est l’approche intégrée de Première Urgence Internationale. Nous agissons dans divers domaines d’intervention notamment la sécurité nutritionnelle et la santé. Nous avons une approche globale afin d’avoir plus d’impact sur le long-terme ». Former le personnel d’Etat, développer les activités agricoles, les champs d’action sont nombreux, « encore faut-il trouver les financements ».

« Il devient indispensable de se focaliser sur l’insécurité alimentaire, d’avoir une approche globale pour être efficace ». Et puis le but ultime d’une association humanitaire, c’est de pouvoir se retirer en laissant une situation plus stable pour les populations, meilleure et gérée par le pays. « Nous nous préparons toujours à sortir du pays », ». Mais pour le moment, la population du Ouaddaï, souffre, rappelle Valentin, « elle manque de tout  et a toujours besoin d’aide».

Photos © Frédéric Noy

Lire l’article de Libération de juillet 2018 sur la situation au Tchad et les propos de notre cheffe de mission.

Ce projet a été rendu possible grâce à la contribution de la Direction générale des opérations européennes de protection civile et d’aide humanitaire (ECHO).

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