« La gestion de camp, c’est quasiment l’équivalent du travail d’une petite mairie »
Au Cameroun, Première Urgence Internationale intervient dans plusieurs camps accueillant des réfugiés centrafricains. Ils se sont construits en 2014 après des vagues de violence en République centrafricaine (RCA) qui ont entraîné la fuite de nombreuses personnes vers les pays limitrophes. Fanny Vagné est responsable technique urgence au Cameroun. Elle est en charge du projet de gestion de camp et de constructions d’abris dans le pays.
Concrètement, en quoi consiste la gestion de camp ?
« La gestion de camp regroupe beaucoup d’activités. Le but va être d’organiser le camp tout en apportant une réponse dans un ensemble de domaines allant de l’accès à l’eau, à la santé ou encore à l’éducation. En tant que gestionnaire de camp, notre rôle est de coordonner l’action des différents partenaires humanitaires qui interviennent sur le site pour assurer une couverture complète des besoins et éviter des doublons dans les activités.
Par ailleurs, nous pouvons également participer à l’identification de certains bénéficiaires. Pour cela par exemple, nous tenons des bases de données sur les mouvements démographiques, les naissances, les décès… Egalement, nous encadrons et accompagnons vers l’autonomie les comités de gouvernance élus dans chaque camp. Nous nous assurons aussi de la coexistence pacifique entre les communautés hôtes et réfugiées.
Nous avons également un rôle à jouer sur l’aménagement du site, c’est-à-dire s’assurer que le camp réponde aux différentes normes humanitaires. En termes de sécurité, il s’agit par exemple de veiller à prévoir suffisamment d’espace entre les abris ou encore de s’assurer de la sécurité sur les différents axes qui traversent le camp. Quant à la circulation, il faut prévenir les risques d’inondations ou de chutes d’arbres, prévoir l’éclairage des routes et accès. En ce qui concerne les infrastructures, nous devons déterminer combien de latrines prévoir mais aussi respecter la distance standard entre les abris et ces latrines. Il faut également gérer les espaces communautaires comme les lieux de réunions, les abris communautaires, les hangars de stockage etc.
Pourquoi tout cela est-il nécessaire ?
Il faut s’imaginer que la gestion de camp c’est fournir un service là où il n’y en a pas suffisamment. En effet, l’Est du Cameroun est peu développé, avec peu d’infrastructures et services étatiques en capacité de répondre à la pression exercée par des arrivées massives de populations. Nous devons donc organiser toute une communauté. C’est quasiment l’équivalent du travail d’une petite mairie. Il faut s’assurer que les personnes aient accès aux services auxquels elles ont le droit, comme l’accès à l’eau, à des conditions de vie dignes, à de la nourriture, à la santé, à l’éducation etc. Et il faut les accompagner dans ce processus.
Tu travailles sur la gestion de camp et la construction d’abris, en quoi sont-elles complémentaires ?
La construction d’abris se concentre sur le fait de fournir un toit aux familles qui n’en n’ont pas. On va donc acheter et fournir des matériaux puis aider à la construction des abris. La gestion de camp, quant à elle, comprend d’abord une identification des personnes dans le besoin puis une communication avec le partenaire le plus adapté -celui qui s’occupe des abris, celui qui s’occupe de la sécurité alimentaire ou encore celui qui s’occupe de l’accès à l’eau en fonction- afin de lui signaler le besoin de telle ou telle famille.
Pourquoi agir au Cameroun sur ces domaines en particulier ?
Les camps au Cameroun existent depuis longtemps maintenant et le contexte sécuritaire toujours explosif en RCA rend difficile d’envisager un retour des populations dans leur pays d’origine. Mais les abris d’urgence qui ont été construits dans les camps se détériorent rapidement. Ils n’ont pas été conçu pour de la longue durée. De plus, les contraintes climatiques exercent une forte pression : la pluie rend les pistes boueuses et impraticables et les vents fragilisent les maisons et leurs toitures. L’aide qu’on apporte leur est donc nécessaire.
En 2014, la République Centrafricaine (RCA) voisine a connu un regain de violence. Les populations centrafricaines ont donc fui et sont venus se réfugier par milliers dans les pays autour et notamment au Cameroun. Nous intervenons dans 7 camps de réfugiés centrafricains. Le plus petit comporte 1 000 personnes, le plus gros plus de 22 000 personnes. »