Birmanie : La téléphonie mobile au service des mères et de leurs enfants


Comment exploiter les technologies de l’information et de la communication (TIC) pour renforcer la qualité des soins de santé materno-infantile ? C’est ce que Première Urgence Internationale expérimente actuellement en Birmanie. L’ONG a lancé, en partenariat avec Télécoms Sans Frontières (TSF), un projet innovant basé sur l’utilisation des téléphones portables pour améliorer la santé des mères et de leurs enfants en Birmanie. Explications.

En Birmanie, l’un des pays les moins développés au monde, l’accès aux soins de santé les plus basiques fait cruellement défaut. À Dala, commune rurale séparée de Rangoun par un fleuve, les taux de mortalité materno-infantile sont alarmants : près de 4 % des enfants de moins de 5 ans et 0,2 % des mères meurent tous les ans des suites de complications liées à la grossesse, à l’accouchement ou à un manque de suivi postnatal. Cette zone périurbaine ne compte en effet que six docteurs et 24 sages-femmes pour 150 000 habitants. Pour compenser ces lacunes, le gouvernement birman a mis en place un réseau d’auxiliaires sages-femmes – des volontaires qui exercent à l’échelle communautaire – dans les zones les plus reculées. Elles sont chargées de détecter les grossesses à risque et les urgences chez les femmes enceintes, d’assurer les premiers secours et de les orienter vers les sages-femmes et les structures qui pourront les prendre en charge. Mais ces auxiliaires ne reçoivent que six mois de formation et ne sont pas habilitées à effectuer des accouchements elles-mêmes, bien que cela arrive parfois à cause de l’isolement des zones où elles exercent. Ainsi, près de la moitié des accouchements s’effectuent sans personnel qualifié, et souvent dans des conditions dangereuses.

Pour améliorer la qualité des soins prodigués, Première Urgence Internationale a mis en place, depuis septembre 2013, un projet destiné à renforcer les compétences des sages-femmes et des auxiliaires, tout en resserrant les liens et la communication entre elles. Les équipes de Première Urgence Internationale dispensent ainsi des formations continues pour compléter leurs formations initiales et permettre aux auxiliaires de référencer les patientes vers les structures où exercent les sages-femmes, plus qualifiées.

« À l’heure actuelle, la seule façon de réduire le taux de mortalité materno-infantile est de renforcer le rôle des sages-femmes. Ce sont elles qui assurent la continuité des soins entre ceux prodigués à l’échelle communautaire et ceux qui s’inscrivent dans le système de santé primaire », déclare Aude Morille, responsable technique des programmes de santé materno-infantile de Première Urgence Internationale en Birmanie.

L’efficacité de ce programme repose en partie sur une approche innovante ayant recours à l’utilisation de la téléphonie portable : la Santé mobile (aussi appelée mHealth). Depuis 2014, Première Urgence Internationale a ainsi développé une application téléphonique spécialement conçue pour les sages-femmes et les auxiliaires, et adaptée au contexte birman. À chaque visite médicale, une série de questions sur l’état de la patiente les guide pour effectuer la consultation selon le protocole médical national et les standards internationaux. Elles peuvent ainsi s’assurer qu’elles n’ont pas oublié de vérifier certains éléments clés. À partir des données renseignées, l’application indique ensuite les gestes à effectuer, ou la nécessité d’orienter la bénéficiaire vers une sage-femme. Outre le fait que ce système aide le personnel de santé local à effectuer le bon diagnostic pour réaliser une consultation de qualité, il remplit donc aussi un rôle de formation. Par ailleurs, l’application permet aux auxiliaires travaillant dans des régions isolées de créer un dossier de suivi informatisé pour chaque patiente, et de partager facilement les données avec les sages-femmes amenées à les prendre en charge.

En amont du lancement du projet, Première Urgence Internationale a fourni des téléphones portables à une trentaine de personnels soignants. La plupart de ces femmes n’ayant pas accès à l’électricité de façon continue, des mini-panneaux solaires leur ont même été fournis pour qu’elles puissent recharger leurs appareils quel que soit l’endroit où elles se trouvent. Des sessions de formation ont ensuite été organisées pour leur apprendre à se servir de l’application.

Pour l’heure, le déploiement de ce mode opératoire innovant s’est limité au district de Dala, afin d’en tester les avantages et d’ajuster le système aux besoins de la population birmane. C’est en effet la première application de ce type qui ne cible pas seulement le personnel humanitaire expatrié mais qui est destinée au personnel de santé birman, pour s’inscrire dans une logique de renforcement des compétences locales. Le ministère de la Santé birman a été séduit par ce projet ; Première Urgence Internationale l’étendra dès 2015 à l’État Karen, dans lequel les besoins en matière de santé materno-infantile sont également très importants.

Alors que le développement fulgurant des TIC engendre des mutations dans bien des secteurs de l’économie et que leur utilisation tend à se démocratiser, la concrétisation de ce projet de « santé mobile » marque la volonté de Première Urgence Internationale de les intégrer à l’action humanitaire. Pour améliorer notre réactivité, surmonter la distance imposée par les zones dangereuses ou isolées, et surtout pour apporter une réponse toujours plus efficace et pertinente aux besoins des populations les plus vulnérables.

Depuis son accès à l’indépendance en 1948, le Myanmar a connu de nombreux conflits entre différentes minorités ethniques. Après des décennies de dictature de junte militaire, un certain nombre d’avancées positives ont pu être constatées depuis 2009 en matière de droits de l’homme. Malgré ces progrès apparents, les minorités et les déplacés ne parviennent pas à couvrir leurs besoins essentiels et sont confrontés à des difficultés d’accès aux soins. Présente dans le pays depuis 1984, Première Urgence Internationale mène actuellement des programmes de santé dans la région du Thanintharyi et l’État Karen, ainsi que dans plusieurs districts périurbains du sud de Rangoun.

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