« L’humanitaire ce n’est pas seulement un métier pour moi, c’est un style de vie »


Pascal Maillard est coordinateur terrain. De retour de mission en Haïti, il nous raconte son expérience de vie dans le monde de l’humanitaire ainsi que sa vision du secteur.

Pascal Maillard nous présente sa vision de l’humanitaire

Comment es-tu arrivé dans le monde de l’humanitaire ?

A l’origine, j’ai un parcours universitaire classique. A 23 ans, j’avais avant tout comme idée de parcourir le monde et de découvrir d’autres modes de vie. La porte d’entrée a été la solidarité internationale. Dès ma première mission, ce qui représentait pour moi un moyen d’être mobile est devenu un but, une façon de vivre. Et cela ne m’a jamais réellement quitté. Je suis alors parti sept ans en mission, notamment pour Première Urgence Internationale au Moyen-Orient et en ex-Yougoslavie.

Tu as toujours travaillé dans le secteur humanitaire ?

Non, après sept années à enchaîner les missions, je voulais me confronter à d’autres expériences, en particulier en France. Très vite je suis devenu cadre dans une association d’éducation populaire en tant que coordinateur de projets éducatifs. Durant cette expérience professionnelle d’une dizaine d’années, j’ai fait appel à de nombreuses compétences acquises sur le terrain humanitaire.

Mais les dernières années, l’humanitaire me manquait. Je savais que j’allais retourner d’une manière ou d’une autre dans ce milieu. J’ai alors commencé à renouer avec lui en effectuant des missions courtes en tant que consultant au Kurdistan irakien et formateur pour des sessions de préparation au départ.

Quelle mission a été la plus marquante pour toi ?

C’est une question difficile car j’ai fait plus d’une quinzaine de missions sur les principaux théâtres d’intervention humanitaire ! Le Kosovo avec Première Urgence Internationale, par exemple, a été particulièrement fort et fondateur tant sur le plan professionnel qu’humain.

Nous sommes au début des années 2000. Slobodan Milosevic retire les troupes serbes du territoire kosovar suite à l’intervention de l’OTAN. Cette même année, il est inculpé devant le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide. En plein hiver, les populations manquent de tout. Les tensions demeurent extrêmes entre la minorité serbe, orthodoxe et la partie albanaise musulmane, majoritaire. Dans ce contexte, Première Urgence Internationale décide d’intervenir pour les deux communautés en se basant sur nos principes de neutralité et d’impartialité.

Cette mission a été pour toute l’équipe une véritable aventure collective. Elle s’est établie à une époque où le milieu humanitaire était beaucoup moins standardisé, moins contraint par les règles de sécurité et sans doute plus idéaliste ! Nous étions les seuls à intervenir dans certaines zones critiques du territoire, en théorie inaccessible, comme les enclaves serbe. Chaque jour nous devions nous adapter pour trouver des parades permettant de mener à bien notre mission. Cela nous a profondément soudés. Encore aujourd’hui, 18 ans après, nous continuons de nous revoir et nous pouvons toujours compter les uns sur les autres. Bien sûr cela marque dans une vie !

Qu’est-ce que tu aimes le plus dans l’humanitaire ?

J’aime la période « juste avant », celle de l’atmosphère des aéroports, de l’embarquement et du voyage en avion. C’est un moment particulier où tu es toujours seul, allant vers une forme d’inconnue, juste avant le démarrage d’une nouvelle histoire. Moment idéal pour faire le vide ! A chaque fois, tu as l’impression de repartir de zéro. Chez moi cela génère une forme de stress positif, sans doute le fait d’être attiré irrésistiblement vers de nouveaux horizons.

Qu’est-ce que tu retiens de tes expériences ?

Déjà ce que je retiens c’est qu’une simple envie de voyager il y a plus de vingt ans s’est transformée en vocation. L’humanitaire ce n’est pas seulement un métier pour moi, c’est un style de vie. Il permet de voir le monde pour mieux le comprendre. Il nous pousse à ne jamais nous conformer à des certitudes mais à entretenir une curiosité bienveillante.

Surtout, les expériences structurent le sens donné à notre engagement. Avec Première Urgence Internationale, comme avec d’autres ONG internationales, j’ai vu l’importance d’être présent là où les populations victimes de crises souffrent le plus. C’est sans doute lié au fait que, de par mon caractère, je suis davantage ce que l’on appelle dans notre jargon un « front liner », plus à l’aise dans les situations d’urgence pure que dans le développement.

Et maintenant ?

Maintenant et dans les mois à venir, je compte poursuivre l’aventure avec Première Urgence Internationale. Mon poste actuel de « coordinateur terrain mobile » me permet d’aller sur des missions très variées, d’apporter mon expérience et de partager ma vision avec la nouvelle génération d’humanitaires et c’est ce qui me motive le plus.

Ma seule ambition est de continuer à faire ce que j’aime, à être le plus raccord possible avec mes valeurs et ma façon d’appréhender la vie. Je n’ai jamais cherché à construire un parcours idéal, prédéfini ; je fonctionne davantage à l’instinct. C’est ma façon de me sentir libre !


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